Tête de bodhisattva
Stuc
Ancienne région du Gandhāra
IVe-Ve siècle
H. 15 cm
Description
Une apaisante image de bodhisattva
Ce bodhisattva possède un visage remarquable, d’un ovale presque parfait et empreint de sérénité. La tête dégage selon les codes de l’art « gréco-bouddhique » du Gandhāra un sentiment de plénitude et de piété. Les paupières, mi-closes, sont le signe de sa profonde méditation, tandis que la bouche, petite et charnue, très joliment dessinée, esquisse un délicat sourire. Cette expression n’est pas sans rappeler celle des Buddha et bodhisattva en stuc, réalisés à la même période et dont on trouve des exemples de comparaison dans les grands musées. L’iconographie gandhārienne accorde en effet une grande place aux “bodhisattva”, êtres spirituels “promis à l’Eveil”, état spécifique des Buddha historiques avant leur “Illumination”. Ils ne peuvent rétrograder dans le cycle des réincarnations, prenant en compassion les créatures qui peuplent le monde phénoménal et ne voulant obtenir qu’avec eux la libération du cycle causal. Ces personnages seront l’une des grandes spécificités du bouddhisme du Grand Véhicule (Mahāyāna).
Un témoin de l’art du Gandhāra exprimé en Afghanistan
De fines incisions caractéristiques des sites de l’Afghanistan, notamment Hadda, soulignent les yeux en forme d’amande, dessinent les sourcils, marquent les narines, et accentuent le relief des lèvres. Il faut aussi noter comme trait distinctif de ces oeuvres la dépression au milieu du menton, sous la bouche. Dessinant une frange caractéristique sur le front, des boucles jointives et régulières s’émancipent du reste de la chevelure. Celle-ci se compose de mèches tirées vers l’arrière qui s’élevaient en chignon aplati d’où retombaient de plus longues boucles ondulées ou des rubans. Un bandeau tressé maintient et pare l’ensemble.
Le stuc : une grande liberté de traitement
Attesté au Gandhāra comme en témoignent notamment les sites de Hadda en Afghanistan ou de Taxila au Pakistan, le stuc fut employé avec brio. Les statues étaient exécutées à l’aide de moules, les formes obtenues reprises à la spatule. Cette technique permet beaucoup d’aisance dans le traitement et d’obtenir, comme ici, des visages au modelé incroyablement souple. La bouche, à la réalisation particulièrement sensible, en est un bel exemple. Souvent, les têtes en stuc plus fin étaient cuites à part et collées aux corps à la barbotine. Cette tête de bodhisattva devait participer du décor des cours extérieures des monastères, accessibles aux dévots. Un fin engobe – encore très manifeste sur l’ensemble de la surface – couvrait le tout, dissimulant toute disparité et portant une riche polychromie de couleur rouge, ocre et noire, visible ici au niveau des sourcils et du bandeau.
Provenance : Collection privée, France, constituée dès les années 1930.